L'Ugict CGT publie les résultats de son baromètre sur l'opinion et les attentes des cadres.
Travailler plus pour gagner moins
Un ancien ministre a récemment estimé que le modèle des 35 heures devrait disparaître car les français·es, selon lui, ne “travaillent pas assez”. Or, l’Insee rappelle que la France se situe dans la moyenne en nombre d’heures travaillées (à temps complet), à savoir en moyenne 40,1 heures par semaine.
Dans l’encadrement, cette durée du travail explose.
- 63% des cadres déclarent travailler plus de 40 heures par semaine,
- Un cadre sur quatre déclare travailler plus de 45 heures par semaine,
- 82% des cadres déclarent faire des heures supplémentaires,
- Plus d'un cadre sur deux (51%) déclare faire régulièrement des heures supplémentaires.
Le plus alarmant, c’est que les heures supplémentaires ne sont en général ni récupérées, ni rémunérées, et ce que les cadres soient au forfait-jour ou non pour :
- 58% des cadres,
- 83% des cadres en forfait jour
Au travail aussi, la parole et les actes racistes se libèrent
Nous traversons une période de libération de la parole raciste et xénophobe accentuée par les scores électoraux de l’extrême droite.
Pour cette raison, et après que la CGT et son Ugict se soient mobilisées contre l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, une partie de l’étude est consacrée à la question des discriminations racistes au travail.
Les chiffres du baromètre font l’état de paroles et actes racistes décomplexés :
- Plus d’un·e cadre sur trois (38 %) a déjà été témoin ou victime de “blagues” racistes ; un·e cadre sur dix déclare en avoir déjà été victime
- Plus d’un·e cadre sur cinq a déjà été témoin ou victime de discriminations raciales dans l’évolution de la carrière (21 %).
- 14,5 % des femmes déclarent avoir déjà été victime de “blagues” racistes, contre 7 % des hommes.
Force est de constater que le patronat, qui plus est, ne prend pas ses responsabilités en matière de prévention et de sanction des actes discriminatoires :
- Un·e cadre sur deux déclare que son employeur ne l’a jamais informé·e des droits et des recours en cas de comportement raciste au travail.
- Seul·es 55 % des cadres estiment que leur employeur agit pour lutter contre le racisme au travail.
Droit d’alerte et propositions alternatives : les cadres veulent se faire entendre
Les cadres ont un positionnement particulier dans l’entreprise, puisqu’ils et elles sont à la fois victimes et vecteur·rices de directives avec lesquels ils et elles peuvent être en désaccord.
La pression reposant sur les cadres va jusqu’à exiger d’eux qu’ils et elles limitent leur propre liberté d’expression, à l’image du groupe LVMH au sein duquel l’employeur a interdit au plus haut niveau d’encadrement de s’adresser à sept médias, dont le journal Médiapart. (Cet article est paru et publié sur le site de la cgt.fr)
Toutes ces pratiques ont des conséquences en termes de mal-être au travail, et les cadres l’ont exprimé dans notre enquête :
- Deux cadres sur trois ne se sentent pas associé·es aux choix stratégiques de leur entreprise ou administration (66 %).
- Plus d’un·e cadre sur deux (52 %) déclare être fréquemment en contradiction avec les choix et pratiques réelles de son entreprise ou administration (+3 points par rapport à l’année dernière).
- Près de 6 cadres sur 10 (58 %) aimeraient disposer d’un droit d’alerte dans l’exercice de leurs responsabilités, afin de pouvoir refuser la mise en œuvre d’une directive contraire à leur éthique.
- Concernant la marge de manœuvre des cadres pour alerter leur direction, celle-ci reste bien trop faible.
Un quart des cadres déclare avoir déjà eu connaissance d’informations portant sur des faits répréhensibles ou portant préjudice à l’intérêt général ; sur ces 24 %, ils et elles sont la majorité (55 %) à déclarer ne pas les avoir dénoncés.
Et les risques de répression sont toujours beaucoup trop élevés :
- Pour les cadres ayant dénoncé ces faits répréhensibles, près de la moitié (48 %) a subi des représailles (sanction, intimidation, menace sur leur carrière) ;
- Parmi les 18-29 ans, ce chiffre explose à 82 % ! 75 % des ingénieur·es et cadres techniques d’entreprises ont aussi subi des représailles.
- Pour les cadres n’ayant pas dénoncé ces faits, c’est en majorité car ils et elles ressentaient un sentiment d’impuissance (39 %), ou bien qu’ils et elles ne faisaient pas confiance à leur entreprise/administration (33 %), ou encore par peur de subir des représailles (27 %).
La mobilisation exceptionnelle pendant les élections législatives démontre une capacité de résilience et de résistance citoyenne face aux discours fatalistes. Le gouvernement, malgré une mobilisation historique des organisations syndicales, a quant à lui été lourdement sanctionné pour son passage en force sur la réforme des retraites.
Dans cette séquence, la CGT a été motrice dans la constitution d’un Front Populaire articulé autour de nouveaux droits pour les travailleurs et travailleuses. Cette mobilisation paye puisqu’elle a permis de battre l’extrême droite mais aussi de continuer à renforcer l’image positive de la CGT auprès des salarié·es :
- Les cadres font de plus en plus confiance aux syndicats pour défendre leurs droits : ils et elles sont 34 % aujourd’hui (49 % chez les jeunes), contre 17 % en 2012.
- Les cadres font, en contrepartie, de moins en moins confiance à leur direction et aux pouvoirs publics.